Mon grand-père paternel avait une petite collection de modèles réduits de motos dans une vitrine. Quand je venais le voir, il les sortait parfois de leur coque de plastique transparent pour me montrer les admirables détails qui les composaient. Celle qui me plaisait le plus était un roadster Honda®.

Malgré des heures de bonheur en Solex® puis sur son scooter Manurhin® biplace vert , mon père avait eu un ou deux accrochages qui l’ont incité à m’interdire tout accès à la mobylette. Mes rêves se reportent alors sur les albums Panini et leurs autocollants. Ce n’est qu’en 2015, alors que je prends la direction d’un théâtre en région parisienne tout en dirigeant un festival de lecture à voix haute, que mon entourage m’invite à troquer le vélo contre un un scooter. Je m’offre alors un Piaggio MP3 500cm3 pour mon anniversaire et je n’arrive plus en sueur à mes réunions. Je mesure le risque de la conduite de ce type d’engin en Île de France et me souviens des craintes de mon père.

Du jour où j’achète mon scooter, un kyste se développe dans ma paume droite, comme pour me rappeler l’avertissement paternel chaque fois que je serre la poignée de gaz. Dans les années qui suivent, mon fils passe le permis A. J’admire la glisse de la moto qui me rappelle le ski, et me lasse vite de mon MP3.

Après trois plateaux infructueux, j’achète une MT125, réplique de la MT07 sur laquelle je passais le permis A2. Je décroche le précieux sésame et m’autorise enfin à conduire une moto. Mon rêve d’enfant se réalise et mon kyste disparaît comme par magie: l’État m’a donné la légitimité pour conduire un 2 roues à laquelle mon père mettait un barrage. Mon premier choix se porte sur un trail, un DL 650 V-Strom Suzuki de 2011 : l’envie de voyage et d’avoir un accès au off-road, comme je peux le faire à vélo. Quand j’obtiens le permis A en 2021, j’acquiers un nouveau trail, une BMW F 850 GS. Une bête efflanquée, triplement noire.

Mais dès 2020, la question de la sécurité me taraude, tout comme l’envie de trouver des compagnons de route: exceptés mon fils et un de mes amis qui déménage loin de Paris, personne de mon entourage n’est moto. Grâce à une amie, je découvre la CASIM (Chaîne d’Amitié pour la Sécurité et l’Information des Motards), et plus particulièrement la Casim 77 à laquelle j’adhère aussitôt. À travers des cours pratiques et des roulages, je rattrape le temps en acquérant les réflexes que j’aurais acquis avec le temps si j’avais commencé la moto plus jeune. Après avoir obtenu mes Visas pour la vie 1 et 2, je vais pouvoir commencer à encadrer d’autres motards et à leurs transmettre les bons gestes et les bonnes pratiques.

Pourquoi un chapitre sur la moto? Parce qu’il y a quelque chose qui est de l’ordre de l’art de vivre: quand elle entre dans ta vie, elle n’en sort plus. De manière inattendue, je vis moto et je pense moto. À bientôt sur les routes!